Nombreuse

Nombreuse

À seulement 26 ans, l’artiste Up Next France Naë a déjà collaboré avec de grands noms du rap français comme Nekfeu ou Eddy de Pretto. Son EP Nombreuse sortira le 25 mars 2022. Pour Apple Music, elle revient sur son parcours en tant que compositrice et chanteuse, son expérience au sein de l’industrie du disque et son rapport à la musique. L’EP s’appelle Nombreuse, qu'est-ce qui a inspiré ce titre ? Je me suis posé la question du titre il y a tout juste un an, quand j’étais en résidence pour finaliser les morceaux de l’EP avec tous les producteurs musicaux, et notamment une amie, Joy, qui était là pour m’aider à bosser sur l’image et la direction artistique. Un soir, on était en train de discuter de mon projet, de ma musique, de mes perspectives pour la suite, et de ce que je voulais aussi renvoyer en matière d’image et de propos. Et je lui ai expliqué que moi, jusqu’à présent, dans ma vie et dans mon jeune parcours d’être humain et de musicienne, je me retrouvais toujours dans une situation compliquée où j’ai du mal à me définir. Parce que j’ai plusieurs facettes, plusieurs personnalités selon mon humeur, et que ma musique va de pair avec ça. J’ai toujours eu du mal à choisir entre tel ou tel aspect, alors que la société voudrait nous faire rentrer dans des cases. Ces facettes différentes qui me constituent, elles sont aussi légitimes les unes que les autres. C’est pour ça que j’ai voulu appeler cet EP Nombreuse, parce que je reste multiple dans toutes mes personnalités, dans mes influences musicales, artistiques, dans mes réflexions et mes points de vue. Donc Nombreuse c’est aussi un bouclier pour pouvoir me défendre d’avoir toutes ces influences. Ça me permet aussi de justifier un mélange des genres qu’on va retrouver sur l’EP. Quelles sont tes influences artistiques ? Quels sont les artistes qui t’ont le plus marquée dans ta jeunesse ? Ton rapport à la musique ? Quand j’étais petite, j’ai grandi avec un papa musicien amateur. Tous les mardis soir, il répétait avec un groupe d’amis et ils reprenaient des morceaux de rock des années 70. C’étaient mes premières influences musicales. Puis un peu plus tard j’ai commencé à me trouver musicalement. Le premier album qui m’a vraiment marquée c’est celui de Feist, quand je devais avoir 11 ans. Plus tard, j’ai aimé tout ce qui était plutôt rock, comme Arctic Monkeys, et au lycée des artistes plutôt new soul comme Erykah Badu ou Lauryn Hill. Aujourd’hui, je suis très inspirée par des artistes comme James Blake ou Rhye, et toute cette scène, même si ça ne se ressent pas forcément dans ma musique. Mais je sais que ce sont tous ces genres qui me construisent, de façon inconsciente ou pas. Ils ressortent dans mes chansons. Qu’est-ce qui t’inspire au quotidien, dans ta vie personnelle, ta propre expérience ? Je pense notamment à des chansons comme « Le 13 » ou « Plume ». Quels sont les thèmes qui t’ont le plus touchés pour l’écriture de ces titres ? Jusqu’à présent, l’écriture de textes n’a jamais été un exercice simple pour moi. C’est difficile, parce que ça me demande de prendre du recul sur ce que je traverse. C’est pour ça que je suis accompagnée depuis 2 ans par Jérôme Attal. C’est une collaboration super enrichissante pour moi, ce binôme m’a permis d’apprendre quelques petits « tricks » d’écriture, et de libérer ma parole sur certaines choses que je n’arrivais pas à exprimer. Jusqu’au moment où s’est posée la question du lâcher prise, et de raconter à ma façon et de façon plus brute ce qui se passe dans la vie de tous les jours. Le morceau « Le 13 », par exemple, c’est un morceau que j’ai écrit seule en grande partie et ça se ressent. C’est une écriture plus simple, plus directe, où je ne me pose pas la question de la rime, et je crois que ça me ressemble davantage. Je sais que, dans le futur, je veux me diriger vers une écriture encore plus brute et sincère pour raconter mon parcours, raconter ce qui m’a construite en tant qu’être humain. Pour cet EP, le thème que j’ai souhaité aborder est surtout celui de la relation amoureuse. Parce que ces dix dernières années, j’ai l’impression que ma construction personnelle en tant que jeune femme est essentiellement venue du rapport à l’autre, de mes relations amoureuses. Maintenant, tous les morceaux ne sont pas entièrement tirés de ma vie. « Dans le Parc », par exemple, c’est un morceau très imagé, qui ne fait pas référence à une situation que j’ai connue en tant que telle, mais plutôt à des sentiments et des émotions ressentis. « De la pire manière », « Dans le Parc », « Tu verras » sont assez mélancoliques. Ce sont des chansons de rupture ? Très mélancoliques, en effet. Mais je sais que dans ma musique, il y a aussi quelque chose de solaire. Dans la vie, je suis quelqu’un de plutôt enjouée, déterminée, drôle. Dans la musique souvent ce sont les choses un peu badantes qui ressortent, alors que je ne le suis pas tant que ça. Donc dans l’EP j’ai essayé aussi de compenser cet aspect-là avec des musiques entraînantes, des mélodies plus solaires. « De la pire manière », par exemple, évoque une relation amoureuse toxique, mais en même temps c’est un morceau dansant. Je trouve ça important qu’il y ait un équilibre et un contraste. L’EP se termine d’ailleurs sur la chanson « Le Love ». C’était pour finir sur une touche un peu plus légère ? « Le Love », c’était en effet pour terminer l’EP sur une note plus universelle et plus joyeuse. Vu que pour le moment j’essaie vraiment de développer une image forte qu’on puisse reconnaître, les chansons de l’EP sont beaucoup tournées vers mon expérience personnelle. Mais je n’ai pas non plus envie de renvoyer une image mégalo. Et le titre « Le Love » est arrivé quand j’en avais un peu ras le bol d’écrire sur moi. En le mettant à la fin de la tracklist ça permet de se rappeler que, OK, l’amour, ça peut être plein d’émotions et de sentiments parfois négatifs, mais ça doit aussi être quelque chose d’agréable, qui permet de se sentir bien. Tu as fait la première partie d’artistes comme Soprano et Eddy de Pretto, tu as produit la chanson « Elle pleut » interprétée par Nekfeu, tu as aussi travaillé avec le producteur de Booba. Comment s’est passé ton expérience avec eux et avec le milieu du rap francophone ? La première fois que j’ai été confrontée à ce milieu, j’étais pleine d’appréhension, non pas vis-à-vis des gens que j’allais rencontrer, mais vis-à-vis de moi-même et de l’image que j’allais renvoyer. Je voulais à tout prix qu’on me considère en tant qu’artiste et productrice. J’avais peur, de l’amalgame entre le fait que je sois une femme productrice dans un milieu d’hommes, de rap qui plus est, et de renvoyer une image de moi qui ne soit pas la bonne. En définitive c’était une grosse erreur de ma part. Ce sont des mecs qui sont super ouverts d’esprit, super tolérants, super cool. Il n’a pas été question à un seul moment de différence entre eux et moi, du style « je suis un mec, t’es une meuf ». Je suis super reconnaissante de cette expérience. Ça m’a énormément boostée sur le plan humain et sur le plan artistique en tant que jeune artiste et productrice dans le milieu. Et au-delà de ça, j’ai eu la chance de rencontrer beaucoup de producteurs musicaux qui ont arrangé et composé les morceaux de l’EP avec moi. J’ai beaucoup de chance parce qu’à chaque fois ça s’est super bien passé et il y avait du vrai donnant donnant. J’ai senti que j’avais aussi des choses à leur apprendre. Je pense que ce qui m’a aidée, c’est d’être compositrice avant d’être chanteuse. Parce qu’il y a quand même ce truc-là dans l’industrie, ce risque d’être « réduite » au statut de simple interprète, alors que tu peux toi aussi manier les logiciels. Il y a encore certains automatismes dans les échanges en studio. Les mecs sont aux manettes, ils te laissent difficilement de l’espace, mais faut le prendre. Il faut oser être un peu grande gueule. Comment composes-tu tes chansons ? Est-ce pour toi un travail solitaire ou collaboratif ? Au départ, chaque chanson part d’une musique au piano, sans que je me projette dans quoi que ce soit. Et une fois le squelette terminé, je constate qu’on est sur une vibe reggae, pop, rock. Dans un second temps, je vais en studio avec mon meilleur ami et co-compositeur Plae Casi, qui m’accompagne en live et en studio. Là, on va poursuivre le morceau et l’habiller, rajouter la ligne de basse, la batterie. J’adore m’entourer, ce qui se passe en studio : on partage la création d’une œuvre avec beaucoup de gens. Même si mon but à terme, ce serait de me perfectionner encore plus à la maîtrise des logiciels de MAO. J’ai vraiment envie de pouvoir être en totale autonomie sur la création de mes morceaux à ce niveau-là. Avec qui as-tu collaboré pour cet EP ? Jérôme Attal sur les paroles, Plae Casi, mon ami et co-compositeur de toujours, Axel Logan à l’ingénierie son et aux prises voix. Et j’ai aussi eu la chance de bosser avec Holomobb, qui sont deux grands producteurs de rap sur « Dans le Parc » notamment. J’ai aussi travaillé avec Élie, que j’ai rencontré grâce à Tristan Salvati (Angèle, Clara Luciani). Tous les gens avec qui j’ai bossé ont été adorables, je me suis sentie super bien entourée. Comment est-ce que tu envisages la suite ? Dans l’immédiat, j’aimerais me concentrer sur la reprise de quatre morceaux de l’EP avec un guitariste, deux violons, un violoncelle — un vrai groupe, quoi. Le but étant de pouvoir les faire vivre autrement en live aussi. Puis reprendre les concerts et avancer étape par étape, tout en bossant sur l’album à venir.

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