Déroutantes, les années pandémiques ont été le théâtre de remises en question pour bon nombre d’artistes, y compris JP Saxe, un grand sensible né à Toronto en 1993. Plutôt que d’éviter l’inconfort du doute, l’auteur-compositeur-interprète aborde le sujet de plein fouet dans ses créations où l’intimité rencontre les qualités les plus rassembleuses de la pop. Par un étrange hasard, il sort la prophétique « If the World Was Ending », un duo avec Julia Michaels, en 2019, quelques mois seulement avant une vague de confinements à l’échelle planétaire. Si Finneas O’Connell (producteur de la pièce), Sam Smith, H.E.R., Alessia Cara, Sabrina Carpenter, Niall Horan et Keith Urban se joignent à lui pour lancer une nouvelle version de la chanson l’année suivante, c’est qu’elle capture à merveille un état d’esprit largement partagé en cette époque incertaine. Saxe utilise la musique pour amplifier ses questionnements intérieurs. Le titre de son premier album témoigne de sa démarche (Dangerous Levels of Introspection, en 2021, qui signifie « De dangereux niveaux d’introspection »), et sa suite, A Grey Area (2023), explore justement les zones grises qui nous tourmentent. En s’alliant à une imposante brochette de complices (de Camilo à John Mayer), le musicien construit un pont édifiant entre le personnel et l’universel.