Égérie des années 1960 avec son tube intemporel « Tous les garçons et les filles », Françoise Hardy a su imposer son écriture poétique et mélancolique et son timbre de voix si particulier pour devenir une figure iconique de la meilleure chanson française. Née le 17 janvier 1944 à Paris, elle est élevée avec sa sœur cadette par sa mère. Son père, peu présent car marié à une autre femme, est responsable d’une usine de machines à calculer. C’est donc une adolescence compliquée sur le plan familial que vit Françoise Hardy, qui se réfugie dans la lecture et la musique, notamment le rock’n’roll, qu’elle découvre sur la station Radio Luxembourg à travers les chansons de The Everly Brothers, Elvis Presley, Cliff Richard ou Brenda Lee. À seize ans, pour la récompenser de sa réussite au bac, son père lui offre une guitare avec laquelle elle écrit ses premières chansons. Françoise Hardy entre l’année suivante au Petit Conservatoire de la Chanson — dont les cours, dirigés par la redoutable Mireille, font l’objet d’une émission télévisée hebdomadaire — et est signée en 1962 par les disques Vogue qui cherchent un pendant féminin au jeune Johnny Hallyday. Son premier 45 tours « Oh oh chéri » est une production typiquement yé-yé, reprenant et adaptant en français des tubes twists anglo-saxons. C’est « Tous les garçons et les filles », un titre qu’elle a écrit seule, qui la rend célèbre et va marquer pour longtemps le public français. Sur des mélodies mélancoliques, les textes de Hardy reflètent les doutes, les interrogations et l’anxiété que suscitent en elle les relations sentimentales qu’elle chante d’une voix douce et blanche, à la pureté quasi désincarnée, qui rend ses chansons universelles. Après ce premier succès (500 000 exemplaires vendus à la fin de l’année 1962), ses producteurs la laissent composer des chansons d’une grande qualité d’écriture (« C’est à l’amour auquel je pense », « Le temps de l’amour », « Ton meilleur ami »), autant de tubes qui seront regroupés sur son premier album Tous les garçons et les filles. Françoise Hardy se démarque de ses concurrentes de la scène yéyé (France Gall, Sheila) avec son timbre doux et grave et son attitude réservée qui reflète son caractère timide et introverti. De 1963 à 1974, elle sort quasiment un album par an, s’éloignant peu à peu des standards yéyés — Le Premier Bonheur du jour (1963), Mon amie la rose (1964), L’Amitié (1965) — pour affiner une écriture nostalgique et onirique sur des arrangements variés, de la folk classique à la pop orchestrale, qui séduisent en dehors de l’hexagone (son album In English est très bien accueilli en Angleterre et en Amérique). Compagne du photographe Jean-Marie Périer, elle porte alors sur scène les créations de Paco Rabanne, Yves Saint Laurent et Courrèges, côtoie toutes les pop stars de l’époque et s’illustre dans plusieurs films. En 1967, elle est en couple avec Jacques Dutronc — qui restera son éternel compagnon — et son album Ma jeunesse fout l’camp sonne comme un aveu pour la chanteuse qui souffre du rythme effréné des tournées, qu’elle décide d’arrêter, avant de rompre avec sa maison de disques Vogue en 1969. Tiré de l’album du même nom, « Comment te dire Adieu », au texte écrit par Serge Gainsbourg, est un des plus grands succès de l’année et la conforte dans sa décision de ne plus faire de scène. Ses albums suivants, Soleil (1970), La Question (1971) et Et si je m’en vais avant toi (1972) sont plus confidentiels, mais aussi plus ambitieux et aventureux, La Question explorant par exemple la musique bossa-nova. Elle renoue avec le succès en 1973 avec « Message Personnel », un titre composé par Michel Berger, où elle montre une nouvelle fois son talent de chanteuse, alternant récitatif délicat et refrains passionnés. La suite de sa carrière, entre adieux à la musique (avec Décalages en 1988) et retours rock (Le Danger, 1996), la voit multiplier les collaborations, affectueuses — avec Etienne Daho qui lui fait reprendre en duo « Et si je m’en vais avant toi » ou avec son fils Thomas Dutronc qui l’accompagne à la guitare sur l’album Clair-obscur (2000) — ou inatendues — sur l’album Parenthèses de 2006, comportant des duos avec Maurane, Henri Salvador, Alain Souchon, Alain Bashung, Benjamin Biolay ou Julio Iglesias. Le 6 avril 2018, paraît son 28e album, Personne d’autre, dont le titre résume parfaitement le statut singulier de Françoise Hardy sur la scène française : idole des jeunes devenue, comme personne d’autre, icône de la poésie chantée.