Super Comédie

Super Comédie

C’est une sacrée épopée que cette Super Comédie, pour reprendre les mots de Peter Peter. Son odyssée pop intimiste arpente l’amour, la vie, la mort, le tout rehaussé par des échantillonnages créatifs, des synthés flamboyants, mais aussi des guitares truculentes. Car après avoir exploré les claviers sur ses deux albums précédents (Une version améliorée de la tristesse en 2012 et Noir Éden en 2017), l’auteur-compositeur-interprète revient à ce qui le faisait vibrer en 2011, lors de la sortie de l’opus éponyme aux accents folk qui a lancé sa carrière. « La guitare, c’est mon premier amour, mon premier instrument, confie l’artiste à Apple Music. J’avais envie de faire quelque chose qui ne correspond pas nécessairement aux attentes du marché. Que ce soit plus organique. » Enregistré et réalisé de part et d’autre de l’Atlantique, ce quatrième album du Québécois désormais établi à Paris est pétri d’angoisses, d’espoir et d’une douce nostalgie. « Je constate que ma vie jusqu’ici a été longue, et j’aimerais qu’elle le soit encore plus. Pour quelqu’un d’anxieux, c’est quand même optimiste… C’est pour ça que je l’ai nommé “comédie” au lieu de “tragédie”. Il y a des rebondissements, c’est une grande histoire. Je me rends compte que j’ai eu plusieurs vies, et que c’est une sacrée épopée, quoi! » Pièce par pièce, le musicien originaire du Saguenay nous entraîne dans son univers introspectif et éclaté. Super Comédie « Chacun de mes albums est une quête spirituelle, et celui-ci en est une aussi. La spiritualité, je la cherche depuis longtemps parce que je l’ai quittée à l’adolescence, quand j’ai arrêté de croire en Dieu. Et là, le monde n’a pas nécessairement d’alternatives à ça, alors oui, j’aime penser qu’il y a des choses plus grandes que ce que la société nous offre en ce moment. Je parle d’éternité, mais il y a cette angoisse de la mort. Plus je vieillis, plus je me rapproche de cette fin-là, qui est une sorte d’éternité, en réalité, mais aussi la fin d’une histoire. C’est une quête spirituelle que je ne cherche pas trop à encadrer, mais il y a plus grand. Et si je parle d’éternité, c’est que je crois qu’il y a plus que la vie ici-bas. » Conversation « Je me souviens que j’ai écrit cette chanson dans l’heure qui a suivi un rendez-vous avec ma psy. Ça raconte ce moment où j’allais chez elle, que je m’assoyais dans le fauteuil et que je déversais tout ce que j’avais à l’intérieur de moi. Ça parle d’apprendre à être fonctionnel dans la vie, d’apprendre à vivre, qu’on n’est pas grand-chose et que parfois, on ne trouve plus trop de sens à tout ça. On cherche des réponses, et les personnes anxieuses comme moi se posent beaucoup de questions tout le temps. Parfois, c’est simplement en s’assoyant avec quelqu’un et en ayant un échange qu’on réussit à se sentir vivant. » Commun maintenant « Celle-ci porte sur l’imagination qu’on peut avoir avec les réseaux sociaux. Cette nouvelle séduction, le fait de fabuler sur quelqu’un qu’on n’a jamais rencontré… C’est ce sentiment de fausse intimité, ce personnage qui se met à fantasmer sur quelqu’un qu’il ne connaît pas et qui a l’impression que chaque “j’aime” veut dire quelque chose. C’est un délire qui tourne autour de ça. C’est la technologie avec laquelle on vit en ce moment, et ça crée des trucs qui sont sans précédent. » Extraordinaire « C’est une chanson qui parle d’amour, de passion, de sexe. D’être fou de quelqu’un, de s’enfermer, d’avoir l’impression qu’on est à l’abri de tout, même de ses propres craintes, parce qu’on les oublie… qu’on a tout pour recommencer le monde quand on est deux, même si dehors c’est un peu le bordel. Pour l’anecdote, je suis allé à un mariage à Cuba avec seulement une carte de son et un micro, j’ai enregistré la voix là-bas, au centre de villégiature, et je l’ai gardée. Ma relation avec les technologies est assez ambivalente, mais je trouve ça magnifique et complètement fou de pouvoir enregistrer une voix avec presque rien, et que ça finisse sur un disque. » Damnatio Memoriae « C’est un peu l’envers de la médaille d’“Extraordinaire”, c’est-à-dire que la passion, un jour, ça se termine. Je trouvais ça intéressant de parler de “damnatio memoriae”, un concept de la Rome antique qui consistait à faire oublier quelqu’un en enlevant les statues à son effigie et en rayant son nom partout. Dans la rupture amoureuse, bloquer son ex des réseaux sociaux et l’effacer de sa vie, c’est comme si on la condamnait à jamais à l’oubli. Je fais des chansons d’amour, mais j’aime bien créer des chansons d’amour qui finissent mal aussi, parce que ça fait partie de la vie. » C’est une saison sans le temps qui passe « Je ne prévois presque jamais de voyages, c’est souvent très improvisé. Avec ma blonde, quand on en peut plus, on fout le camp, on quitte Paris et c’est un peu l’échappatoire. Ça parle de ces aventures-là, de partir dans une ville sans avoir rien calculé. Ça porte aussi sur nos débuts, quand on ne se connaissait pas encore et qu’on partait sur un coup de tête, en courant le matin de mon appartement au sien pour faire nos bagages ensemble. C’est se sauver et arriver dans un lieu où on prend le temps de faire ce qu’on a vraiment envie de faire. Ça m’aide à affronter la vie et l’anxiété, ces retraites-là. » Les mariés ont disparu « Ça vient d’une phrase que j’ai entendue dans un mariage. On ne trouvait pas les mariés, ils étaient partis de table et quelqu’un a juste dit : “Les mariés ont disparu.” Ça m’a happé complètement, j’ai trouvé ça vraiment fou, pour tout ce que ça voulait dire. Je me souviens, j’étais déjà un peu saoul et je l’ai notée dans mon téléphone. Le lendemain, j’arrêtais pas d’y penser, parce que je trouve que c’est une phrase qui a beaucoup de sens. Donc la chanson parle de l’amour qui s’étiole petit à petit, de ces amoureux qui deviennent chacun un fantôme l’un pour l’autre. » Nature obscène « Celle-là est un peu plus sociétale. Je pense qu’on apprend à vivre avec les codes de la nature humaine. Quand on est plus jeune, on ne le verbalise pas toujours, mais on sait qu’on vit dans un environnement compétitif, où si tu réussis, ça veut dire que quelqu’un d’autre ne réussit pas. C’est ce climat de compétition là, du fait qu’on nous enseigne à être prédateurs l’un pour l’autre. La nature obscène, c’est un peu l’injustice sociale qui perdure, qui va toujours exister, qui est endémique à l’humanité. » Essayer « C’est désirer voir la vie jusqu’au bout, même quand c’est pas facile. Parfois, on ne sent plus rien, mais il faut continuer, toujours faire de son mieux et jamais tomber dans le cynisme et le négativisme. Je l’ai intitulée “Essayer”, mais son premier nom, c’était “Une lettre à moi-même”. C’est quelque chose que je m’écrivais, et que j’écrivais à d’autres personnes aussi. C’est d’essayer chaque jour de vivre et de ne pas lâcher. Elle représente mon côté optimiste, un message d’espoir. Je tente de le coder pour pas que ce soit trop évident, mais je parle beaucoup de la vie. Dans l’album, il y a des critiques de la vie, mais c’est plus un hommage, et cette chanson-là en est un. » Résurrection « Cette chanson parle encore de l’angoisse de la mort et de sentir que, quand on est privé de spiritualité, il faut qu’il y ait quelque chose d’autre. C’est ne pas accepter qu’après, c’est terminé. Il faut qu’on se réincarne, qu’on revive. Pour moi, la musique, c’est une façon d’extérioriser cette angoisse-là. Il y a une injustice dans le fait de savoir qu’on est programmé à mourir. Ce serait l’fun d’avoir une deuxième chance. » Répétition « C’est la première fois que je coécris une chanson. J’aime pas forcer les rencontres, et déjà les collaborations, c’est pas trop mon truc, mais j’aimais l’instrumentation [composée par Aurélien Fradagrada]. Le texte parle de ce démon que j’ai, de m’enfermer chez moi et de me dire : “Faut que je sorte un album”, puis de travailler et de perdre ma relation avec l’extérieur, et à un moment, de ne plus en pouvoir, d’écrire à un ami, de sortir jusqu’à plus d’heure pour retourner à une certaine jeunesse et voir les gens à travers ces yeux-là. Ça revient souvent dans ma vie, de me priver de beaucoup de choses et à un moment, j’en peux plus et je me laisse lousse, comme on dit au Québec. Je l’ai mise à la fin pour le concept que tout recommence, on a chacun nos patterns, nos états d’âme. »

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